Rencontre avec la vielliste Lise Barkas
La musicienne Lise Barkas fait partie de cette foisonnante scène strasbourgeoise qui n’a pas peur des expérimentations. Elle nous parle de son parcours, de ses instruments (la vielle à roue et la cornemuse) et de son processus créatif.
Comment es-tu venue à la vielle à roue et à la cornemuse ?
J’en ai entendu dans des musiques quand j’étais ado. Je me demandais ce qu’était cet instrument. J’ai entendu de la vielle dans Coil. C’était plutôt de la musique avec des synthés modulaires, donc pas vraiment des instruments acoustiques. Ça m’a vraiment intrigué. J’ai regardé tout ce qu’il y avait autour de la vielle. Je voulais comprendre comment ça marche et j’ai fini par en jouer. Puis petit à petit en découvrant les bals folk, j’ai découvert la cornemuse. Ce sont deux instruments souvent joués ensemble. Et comme le mari de ma professeure de vielle enseignait la cornemuse, je m’y suis mise. C’est plus le son qui m’a attirée que le répertoire.
Tu t’es dirigée tout de suite vers des formes expérimentales ?
D’abord j’ai appris à jouer des instruments. Ma prof m’a montré des morceaux, elle venait du Revival Trad des années 70. J’écoutais des musiques autres, des choses un peu expérimentales, bizarres, mais je n’ai pas tout de suite fait le lien entre ce que je jouais et ce que j’écoutais.
J’ai pris conscience qu’on pouvait mélanger trad et drone, qu’avec le même instrument on pouvait approcher ces deux univers.
Comment s’est fait ce lien ?
Au départ, c’était surtout une sensation similaire liée au son sans que j’arrive à l’expliquer. Je n’avais pas forcément les mots, c’était le premier instrument que j’ai joué. Je ne comprenais pas les caractéristiques des différentes musiques. Et en 2012, j’ai assisté à un concert de Yann Gourdon avec Yvan Etienne. Il jouait des morceaux traditionnels, des bourrées, mais avec un jeu imprégné d’expérimentations. Il amène beaucoup de dissonance, de techniques de jeu un peu étranges. Et ils ont joué une partie plus drone. J’ai vraiment pris conscience à ce moment qu’on pouvait mélanger ces différentes choses, trad et drone. J’ai vu qu’avec le même instrument on pouvait approcher ces deux univers. Ça m’a beaucoup encouragé.
Comment composes-tu ? Quelle place a l’improvisation dans ce processus ?
Ça dépend. Toute seule ou avec des personnes. Toute seule j’improvise avec des instruments, je m’enregistre et je retrouve des passages que je rejoue. Avec d’autres personnes, comme par exemple Lisa Kaüffert avec qui j’ai un duo de cornemuses, c’est un peu différent. On part d’idées. On se dit « on voudrait entendre ça avec deux cornemuses, qu’est-ce que ça ferait ? ». C’est beaucoup plus écrit. Il a une part d’impro dans un cadre assez précis. J’ai beaucoup appris grâce à l’improvisation libre.
Il y a différents chemins pour aller d’une mélodie à l’autre selon les sons que peut jouer ma vielle
Que va t’on entendre à Super Flux ?
Si je joue ce que je prévois, ce qui n’arrive pas toujours, ce sera une pièce écrite que je joue depuis deux ans. Je sais qu’il y a des parties qui passent par plusieurs mélodies et il y a différents chemins pour aller d’une mélodie à l’autre selon les sons que peut jouer ma vielle, car il y a parfois des pièces ou des cordes usées. Ce n’est jamais vraiment pareil. J’aime aussi entendre comment sonne le lieu où je vais jouer. J’adapte selon le lieu, l’ambiance, le moment de la journée.
Y a t-il des artistes dans le festival Super Flux dont tu apprécies particulièrement le travail ?
Oui, Pierre Berthet et Rie Nakajima. Ils font partie des personnes qui m’ont beaucoup inspirée. J’avais vu le solo de Pierre Berthet en Belgique dans un festival organisé par Tom Malmendier. Ça m’avait beaucoup plu. On l’avait invité à Strasbourg avec le collectif Kreis en 2018. Ça me fait plaisir de le revoir, surtout avec Rie Nakajima qui avait exposé à la HEAR (Haute Ecole des Arts du Rhin).
Propos recueillis par Mathieu Durieux
Photos : Malick Beytrison / Wim Lecluyse
À découvrir le samedi 6 avril à 15h30 à l'Ecole Supérieure d'Art et de Design TALM Tours dans le cadre du festival Super Flux